« Le film est le résultat naturel de ma vie au Liban, du fait d’être sensible aux réalités quotidiennes et d’avoir de la considération et de l’amour pour ses citoyens et leur culture.
L’odyssée de Rabih pour trouver ses véritables origines lui fait retracer un moment spécifique de l’histoire libanaise, la guerre civile (1975-1990).
Au lieu des faits, il a besoin de résoudre son énigme personnelle, mais on lui raconte des mythes, des visions, des mensonges effrontés. Personne ne peut lui dire la vérité. C’est un phénomène courant depuis la fin de la guerre : les gens se protègent et se dédouanent, le passé est fabriqué, tordu, ou tout simplement caché. Jusqu’ici, pas une seule version officielle de la guerre, chaque communauté élabore et enseigne son propre récit de la guerre, perpétuant ainsi les animosités passées chez les générations futures.
De toute évidence, la guerre n’est pas finie ; elle a juste pris une autre forme. Comme un même événement a donné des histoires multiples, le Liban s’est vu en plus fragmenté par une crise du récit. Cela a exacerbé une instabilité déjà existante, où même les données de base sont sources de litige. En suivant la crise que traverse Rabih, Tramontane porte un regard introspectif sur un pays qui n’arrive pas à affronter son propre passé.
Mon but était de faire un film qui encourage l’échange critique et pousser notre compréhension de nous-mêmes aux prises avec des forces circonstancielles qui découpent nos frontières et nos vies. J’ai eu la chance d’avoir un producteur qui partage ma passion et mon envie de raconter cette histoire, dans la personne de Georges Schoucair de Abbout Productions. Le sujet a également trouvé écho chez mes producteurs en dehors du Liban - Caroline Oliveira et Gabrielle Dumon, Le Bureau - qui ont fortement cru à l’universalité de l’histoire. Nous avons fait ce film car nous voulions le voir nous-mêmes, car nous en avions senti l’urgence et l’humanité. »