Comment vous est venue l’idée du film ?
Je voulais faire un film sur une solitude cristalline qui coule dans une atmosphère ambiante où la communication est, à peu de choses près, entièrement insignifiante, même entre proches. Quand la proximité physique ne veut pas dire grand-chose et que les mots ont perdu leur valeur. Ça m’a pris du temps de visualiser ces sentiments et de leur donner une forme narrative ; les touches finales à apporter me sont venues en rêve.
L’histoire du couple principal traite aussi, de manière implicite, des différences et origines sociales. Pourquoi était-il important d’inclure cette dimension à l’histoire ?
Dans notre quotidien, la plupart des gens ne communiquent pas entre eux mais entre les étiquettes qui les enveloppent : leur statut, leur titre, leur genre, leur classe sociale, leur nationalité, qu’importe. Parfois même la spiritualité, dont la nature même est censée être de nous libérer du diktat des étiquettes, nous en ajoute davantage. Il est extrêmement difficile de s’adresser directement à un autre être humain, de s’assurer qu’on parle bien de la même chose, et qu’on vous a effectivement compris. Les différentes origines de mes personnages sont l’expression de divergences internes beaucoup plus profondes.
Quels ont été vos choix artistiques, par exemple dans les séquences dans la voiture ?
L’un des choix artistiques les plus importants que j’ai fait dans ce film a été de ne montrer personne parler à l’écran. Je ne sais pas pourquoi, mais ça m’énerve prodigieusement de voir des gens parler devant une caméra et d’entendre leur voix en même temps ; dans mes films, en tout cas. En ce qui concerne les séquences dans la voiture, au départ, mon idée était de partager le schéma de ce couple qui se délite à travers les images et les rythmes des rues embouteillées de Bakou.