Le Démantèlement de Sébastien Pilote est porté par le souffle du grand cinéma classique américain, là où le paysage exprime la couleur des sentiments et le rythme devient une respiration. A lui seul, l’acteur (Gabriel Arcand, magnifique) insuffle la vie à la réalité organique du film. On songe à l’humanisme d’un John Ford. S’il ne renie pas ces attaches, Sébastien Pilote inscrit son film dans une autre histoire.
« Mon patrimoine c’est le cinéma direct. Ce sont les films de Michel Brault, de Pierre Perrault.
Le plus beau film de fiction c’est Pour la suite du monde, qui est un documentaire. Je suis parti avec l’idée (c’est Truffaut qui disait ça) qu’un film avec un personnage sur une pente descendante ne pouvait pas fonctionner et intéresser les gens, et je voulais prouver le contraire. Comment pouvons-nous monter en descendant ? Cette montée dramatique et émotionnelle, qui est bâtie sur des «presque rien», vient de mon désir d’être généreux avec
le spectateur et de mon intérêt pour le cinéma mélodramatique. Alors je suis parti avec les personnages du père Goriot et du Roi Lear pour les amener au pays des cow-boys.
Comme dans mon film précédent, Le Vendeur, le film porte sur un personnage. Autre défi. Je voulais que ce personnage puisse voir son monde à tour de rôle, qu’il ne puisse pas voir plus d’un personnage à la fois. Une manière de montrer comment il est lui aussi démantelé...
Gabriel Arcand a une réputation d’acteur de Dostoïevski, de Grotowski, qui refuse la télévision. Un acteur très rigoureux. Je le connaissais des films de Gilles Carle et des premiers de son frère Denys Arcand, mais très peu autrement. J’ai aimé sa photogénie, très américaine.
Son regard… À cause de ses yeux, je me disais… si j’arrive à le faire sourire, c’est gagné. »