La tradition littéraire du grand cinéma bengali (Charulata de Satyajit Ray), nous a familiarisé avec ces inoubliables histoires d’amour portées par l’amour des mots, le plaisir d’écrire et la gourmandise de lire. D’où cette immense joie, avec The Lunchbox, de découvrir un jeune cinéaste hindi qui, non seulement perpétue cette sublime tradition de la plus belle manière qui soit, mais la renouvelle en profondeur en inscrivant son histoire dans la réalité quotidienne de Mumbai (Bombay).
« Quand j’écris une histoire, je n’ai pas un genre en tête. Je pense aux personnages et à la façon dont je peux aller au plus profond d’eux-mêmes. The Lunchbox est une simple histoire d’amitié qui se développe entre deux inconnus, prisonniers de leur enfermement respectif. Certes, la relation épistolaire relève plus de la tradition littéraire que cinématographique, mais comme il s’agit de l’histoire de deux personnes qui ne sont pas douées pour communiquer avec leur propre milieu, qui se sont laissés dépasser par les codes et usages de l’époque contemporaine, il m’a semblé que les lettres et petits mots laissés dans une lunchbox seraient le meilleur moyen pour eux de communiquer, de les sortir d’eux-mêmes en douceur et de les aider à reprendre confiance en eux. En outre, écrire ou recevoir des lettres est une forme de nostalgie à laquelle ces deux personnages sont attachés.
L’impossibilité pour ces deux vies de se croiser, sauf par l’intermédiaire d’une erreur dans le système de livraison d’une lunchbox à Mumbai, tient aussi au fait que la femme au foyer est hindoue et que l’homme au bureau est catholique. De même, le personnage de Shaikh, le collègue de bureau appelé à lui succéder, est issu d’un quartier à majorité musulmane. Mumbai est le lieu où se construit l’histoire, mais c’est aussi la complexité de ses milieux sociaux et religieux que la ville exprime à travers cette lunchbox ».