« J'ai toujours procédé de la même façon au moment d'entamer l'écriture d'un film. D'abord je prends des notes, sans réfléchir, pour laisser remonter l'essence du projet à la surface. Des images, des souvenirs, des lieux ou des ambiances me viennent spontanément en tête. Puis, je laisse reposer plusieurs semaines avant de relire ces notes. Souvent je découvre que, sans m'en rendre compte, j'ai écrit plusieurs fois la même chose, sous différentes formes et qu'une obsession se détache.
Pour Litigante, tout me ramenait au fait que le personnage principal devait être une femme. Je la voyais mère célibataire dans la quarantaine, déjà à la moitié de sa vie, mais encore en capacité de s'inventer une autre façon de vivre. J'imaginais une femme forte, capable de faire face à l'adversité, et je la voyais se débattre, la tête haute, avec des problèmes qui lui arriveraient de tous les côtés. Avec cela en tête, je me suis lancé
dans l'écriture.
Justement, à ce moment, ma mère a été diagnostiquée d'un cancer. Alors que je l'accompagnais dans sa lutte contre la maladie, le film a continué de s'écrire. Et petit à petit, le lien à la mère est devenu le thème central du scénario. Plus largement, la transmission entre les générations. Comment nos relations avec nos parents et avec nos enfants nous façonnent, nous définissent.
Le tournage a eu lieu presque deux ans après le début de l'écriture. Ma mère a joué le rôle de celle du personnage principal. En rémission dans la vraie vie, son personnage dans le film fait face à la récidive de son cancer. La maladie des êtres chers, leur possible disparition, nous fait voir autrement le monde, et nous fait prendre des décisions qu'on était incapables de prendre en temps normal. Huit jours après la fin des prises de vue, mon premier enfant est né. »