« Gabriel était un de mes camarades de classe et mon ami. Il a disparu en 2009. Son histoire est assez connue au Brésil. Je crois que l’idéalisme de Gabriel a touché les gens. Je n’y avais pas pensé au départ mais il me fait penser à Candide de Voltaire. C’est un personnage sans cynisme, clownesque même, qu’on ne voit plus trop au cinéma. Il est très rare pour nous, Brésiliens, de voyager en Afrique. Gabriel y cherchait un bien-être qu’il a trouvé et que j’ai trouvé à mon tour en m’y rendant pour la première fois en 2007. Gabriel, ç’aurait pu être moi.
J’ai compris qu’il me fallait filmer les vraies personnes que Gabriel a rencontrées durant son périple ainsi que leurs témoignages en les rencontrant à mon tour lors des repérages. Mais j’ai toujours eu l’intention de faire une fiction. J’avais un scénario, des scènes écrites où j’avais condensé beaucoup de choses qui étaient arrivées à Gabriel en 70 jours. Scénario que je ne montrais pas aux interprètes sur le tournage. Je voulais maintenir un esprit d’improvisation. Le processus fut assez naturel et magique. Cela donne au film un aspect documentaire mais sa forme est fictionnelle.
Tous ceux qui l’ont rencontré vous disent à quel point Gabriel était naïf et très arrogant. C’est une conséquence de notre éducation au sein de la bourgeoisie brésilienne. Une éducation catholique, masculine, qui vous inculque que vous êtes quelqu’un de spécial, que vous incarnez le meilleur du Brésil. Néanmoins, Gabriel n’est pas un voyageur comme vous et moi. Il va jusqu’au bout de son idée, il vit et partage avec des gens très pauvres. Quiconque a grandi à Rio dans les années 1980 et 1990 est touché par les inégalités. Vivre aisément à cette époque terrible pour le Brésil en termes de misère a créé beaucoup de culpabilité. A ce titre, Gabriel e a montanha commence là où mon précédent film, Casa Grande, finissait. »