Pourquoi s’intéresser à une période que vous n’avez pas vécue et à un genre aussi précis (le catch français dans les années 60) ?
Le film est né d’une photo du célèbre catcheur L’Ange Blanc, en train de boire un verre de vin dans un troquet. Avec son masque. Cela m’avait frappé alors que je ne connaissais rien au catch. En me documentant, je me suis rendu compte que tous ces héros avaient été oubliés. Ce qui m’intéresse, c’est tout ce qui disparaît, tout ce qui est effacé. Ici, c’est toute une mythologie. L’Ange Blanc, c’est presque un super-héros chez Jean-Pierre Melville.
Le film aurait pu s’appeler A la merveille…
Il y a un sens du merveilleux évident dans cette image. Comment les gens de l’époque pouvaient-ils croire à ces combats naïfs ? Je voulais aussi retrouver un sens du merveilleux au cinéma, qui était notamment perdu en France. Le cinéma français a du mal à utiliser sa propre mythologie, à part celle de la Nouvelle Vague. Dans le film, je réconcilie le cinéma dit de papa et la Nouvelle Vague, comme si la guerre entre eux n’avait jamais existé. J’assume son côté transgenre, qui va des séries B de la RKO à David Lynch.
Le film est cinéphile mais en même temps très moderne…
Je ne voulais pas faire un pastiche. Comme chez Godard ou Tarantino, je voulais tordre les codes du film de genre. Etre à côté. Faire un film pop. Mes personnages incarnent justement la tension entre l’ancien et le moderne. Les hommes y incarnent une masculinité triste, dépassée ; les femmes sont la voix de la raison.
Notre délégué général Charles Tesson dit du film qu’il ressemble à du « Jacques Becker filmé par Wong Kar-Wai »…
Cela me va. Je vois aussi le film comme les années 60 fantasmées par un jeune homme d’aujourd’hui. Ou à un croisement entre les Rocky et les Freddy Krueger.