Comment vous est venue l’idée du film ?
Ça faisait plusieurs années que ce film me taraudait ! Le scénario a pris différentes formes. J’ai été agressée sexuellement à l’âge de 16 ans alors que je commençais à avancer dans ma carrière de cinéaste, j'ai eu le sentiment que les scènes d’agressions étaient souvent mal traitées à l’écran. Je voulais faire quelque chose qui parle des pouvoirs publics, de la manière dont je me suis sentie traumatisée, à nouveau, par eux, et comment, eux aussi, ont eu un effet néfaste sur mes relations sexuelles.
La séquence des témoignages devant de nombreux interlocuteurs est, bien sûr, capitale dans le film. Pouvez-vous nous parler de vos choix esthétiques et scénaristiques dans cette séquence ?
Il était très important pour moi que ces séquences soient tournées en 360 degrés. Je voulais qu’on sente qu’elle perd le contrôle de la situation, que cette même conversation se répète et qu’elle sent qu’elle tourne en rond. Je savais que je voulais quelque chose de désordonné et que ça ne devait pas forcément ni faire sens ni être monté comme on fait d’habitude. Il fallait qu’on se sente désorienté, et on n’aurait pas eu le même rendu si ça avait été en caméra sur pied ou à l‘épaule. En ce qui concerne les situations, en ce qui me concerne, je me suis sentie abandonnée par mon médecin, ma proviseure et la police ; c’était donc une évidence pour moi de me concentrer sur ces personnages.
Qu’est-ce qui a été le plus important pour vous ?
Réaliser ce film a vraiment été important pour moi : c’est la psychothérapie la plus chère qui existe ! En ce qui concerne la réalisation du film, il était très important pour moi que la protagoniste (Amy) ne soit pas résolument féminine. Il y a beaucoup d’idées préconçues sur qui sont les victimes d’agressions sexuelles et les raisons de ces agressions. La réalité est que c’est bien plus répandu que ça. Toutes les jugements sur ce que les gens devraient porter, leur look ou leurs actions sont extrêmement dangereuses. C’est d’abord cela que je voulais traiter. Il est temps de parler de comment aider les victimes plutôt que de pourquoi cela s’est passé.