Au coeur de Menarca, il y a une relecture et dé-construction de mythes et fantasmes masculins : « le vagin denté » comme peur de la castration bien sûr ; la légende brésilienne du dauphin rose où l’animal prend forme humaine pour séduire ; le mot « piranha » en lui-même. « Au Brésil, on peut dire que le piranha est une représentation culturelle du féminin monstrueux », explique la réalisatrice Lillah Halla. « Non seulement le mot est féminin, mais en plus, en portugais brésilien, c’est une manière désobligeante d’appeler une femme sexuellement active, un peu comme “salope” ou “pute”. “La Femme piranha”. Là encore on parle de dents et de sexualité. »
A travers l’irruption d’une étrange femme-piranha, Menarca témoigne aussi de l’intérêt de Lillah Halla pour les chimères, les créatures hybrides, leur manière de bousculer les stéréotypes : « les hybrides sont des créatures symboliques nées d’une angoisse culturelle. Elles entravent le système établi car elles ne rentrent dans aucune case et menacent le statu quo et sa binarité. Elles transgressent et voient la possibilité d’un futur inimaginable. »
La transgression est ici forcément synonyme d’épreuve, pour tout un village et les deux jeunes protagonistes du film. Avec des résonances politiques : « Menarca est non seulement un rite initiatique mais aussi un cri de liberté de la part de deux enfants dans un environnement hostile. Je suis convaincue que lorsque le gouvernement devient l’oppresseur, la transgression est une tentative de survie. Il est essentiel pour moi que cela se matérialise dans le film, surtout au regard ce que nous vivons actuellement au Brésil. Bien sûr, la manière dont Nanã résout le conflit est magique et ne peut s’appliquer de manière didactique. Mais en tant que conteuse, je crois à la force des symboles, à l’impact des images et des histoires ».