À propos de Aftersun
par Pauline Mallet
par Pauline Mallet
Le film s’ouvre sur une image projetée sur un écran de télévision. On le devine aisément par la silhouette féminine qui se dessine brièvement sur le reflet de l’écran noir. Ce qui est projeté c’est l’image, abîmée par le temps et la qualité vidéo, d’un homme. Il est filmé en contre-plongée. C’est par l’intermédiaire des yeux de Sophie que Calum nous est introduit. C’est par ces yeux, ceux d’une petite fille regardant son père, que ce brillant premier long-métrage de Charlotte Wells nous touche en plein cœur.
Entretien avec Charlotte Wells
«Mes parents étaient assez jeunes quand je suis née et au fur et à mesure que je grandissais, les gens avaient tendance à prendre mon père pour mon frère. Ça m’a toujours semblé être une relation amusante à explorer dans un film. Vers la fin de mon cursus à l’école de cinéma, je feuilletais de vieux albums de vacances et c’est à partir de ce moment-là que l’idée a commencé à prendre racine. Il existe une seule vidéo de moi datant de l'âge de Sophie et c'est un clip totalement banal qui regroupent des séquences au format MiniDV : mon père, un de ses amis et moi assis autour d'une table en train de jouer à un jeu, nos têtes coupées en haut du cadre. Je pense que pour une certaine génération, les images DV créent, immédiatement, des sentiments de nostalgie mais ces images réelles, du moins celles que j'ai, ne sont pas très intéressantes. Je voulais dépeindre une relation qui n'était pas excessivement tendue. Sophie et Calum ont des hauts et des bas au cours du voyage mais leur relation elle-même n'est pas une énorme source de conflit. Je voulais que Calum soit un bon père, qu’il soit bon à bien des égards, contrairement à un portrait de père absent. Calum a quelques difficultés avec certains aspects de sa vie mais être parent n'en fait pas partie. En vieillissant, je passe plus de temps à réfléchir à la façon dont mes parents ont géré leurs vies et construit leurs identités, en particulier tout au long de leurs vingtaines et au début de leurs trentaines, avec le fait d'avoir un enfant. Souvent, pour les enfants, les parents ne sont que des parents et leur vie intérieure est totalement inconnue voire même inconsidérée. Avec le recul, les choses qu'ils ont faites ou dites ont une portée complètement différente. J’étais donc intéressée par cette idée de réévalu»